Romane Santarelli
OK:KO
Si loin, si proche. En s’élevant sur les fondations de ses précédents opus, Romane Santarelli s’approche du point de fuite pour ouvrir l’horizon à OK:KO, nouveau recueil de contes électroniques intimes et renversants, corps suspendus entre la crainte d’un chaos numérique imminent, et la quête d’une paix intérieure salvatrice. En 14 plages, sensuelles et charnues, parfois habitées de voix froides et inquiétantes, ou inondées de chants enjôleurs, l’acceptation crie soudain révolte, l’âme apaisée se rêve chaos, la lutte devient étreinte. D’une froide apparence, l’écriture voit loin et transfigure chaleureusement ces nouveaux épisodes d’une electronica extrêmement personnelle, nourrie depuis les origines de la grâce malicieuse d’un Rone, de l’élégance d’un Frahm, de la joie d’un Kalkbrenner, et parfois, comme sur ce Physio léger comme une vraie chanson pop, de l’intelligence rare d’un Bel Canto, à cheval entre voix flashy et machines sombres.
Car c’est bien là que se joue l’avenir de OK:KO, sur le fil des ruptures, dans le minuscule et le grandiose, entre les claires-voies d’un Verti Go, où la platine n’est peut-être pas celle que l’on croit, habile trompe l’oeil cinématographique. Chaque son, que l’on pourrait toucher du doigt tant la matière y est organique, charnelle, caressante (Slow Down, interlude enchanté et enchanteur), raconte les tensions, les abandons, la joie de s’offrir aux crépuscules, la stupeur de s’éveiller encore en vie. On est ici de plain-pied dans une image de Gregory Crewdson, immobiles, à l’affût de l’horreur ou du bonheur, comme le racontent de larges claviers grondants ou des beats légers comme le vent, à une seconde du chaos originel ou d’un monde meilleur, comme le soufflent les voix de No Way Out, épopée en format chanson suspendue entre l’espérance de la transe et la désolation de nos destins. La fin ? C’est la Belle Vie, ses claviers et ses beats sautillants, c’est la musique tout entière, à travers des compositions savamment désenchantées et brillamment orchestrées, malines et puissantes, romantiques et tapageuses, qui nous tient debout, contre vents mauvais et marées noires.